Les acras
sont avec le boudin créole un des mets de la gastronomie antillaise les
plus connus. Ici, je ne vais pas vous parler des acras Portugais (à
base de pommes de terre), ni des Acajarés Brésiliens de la région de Bahia (à base de farine de pois-chiche), ni des Ocra à Cuba, ni d'autres sortes de beignets pouvant porter le même nom, je vais vous parler des acras antillais appelés également "marinades"
en Martinique. Mais on peut raisonnablement penser que le mot
"marinade" ait été écarté pour éviter une possible confsion avec son
usage dans la cuisine française, à savoir un mélange de vin, de vianigre
salé et épicé dans lequel ont fait macérer du poisson ou de la viande
avant cuisson.
L'origine Africaine du mot acra est établie, il signifie beignet de légumes dans la langue éwé du Dahomey
mais on ne sait pas à quel moment l'habitude fut prise de varier les
beignets en ajoutant la morue ou autre ingrédient autre que les légumes.
La version à la morue, acras de morue, portait auparavent le nom de "Lozi", qui signifie dans la langue Dahoméenne, "Oeil de caïman", terme très utilisé par les anciens et qui a disparu dans les années 60.
Dans la
première moitié du 20e siècle, les accras constituaient avec le pain le
petit déjeuner des travailleurs martiniquais. Les accras étaient vendus
par des marchands ambulants. Jusque dans les années 70 et même à ce
jour, les accras étaient proposés au dîner.
De nos
jour, les acras sont à base d'ingrédients plus nobles tels que la
langouste, les oursins... un genre gastronomique créole qui a délaissé
le petit déjeuner des ouvriers pour des notes de noblesse. Mais
certaines familles, celles qui pratiquent le jeûne, consomment des
accras aux légumes au vendredi saint : des acras au giraumon sorte de
potiron), à la carotte et au chou caraïbe, une manière d'honorer l'acras
traditionnel.
Pour finir, j'ai envie de vous raconter une jolie histoire, celle de Ti-Jean la fortune,
c'est le récit d'un jeune garçon, pauvre qui ne peut compter que sur
son intelligence pour avoir un bel avenir, et ce grâce à un acra durant
la période de la famine :
Une
mère meurt si pauvre que chacun de ses deux fils ne reçoit en héritage
qu'un acra. L'aîné mange le sien et Ti-Jean garde le sien et part en
voyage. Il arrive à une maison où on lui accorde l'hospitalité, il
annonce qu'il possède un acra huileux et qu'il ne peut dormir que dans
un poulailler. Lendemain l'acra a été naturellement dévoré, Ti-Jean
exige en échange le plus gros coq. Il continue son voyage et demande
l'hospitalité d'une grande maison, grâce au même subterfuge, il réussit à
échanger le coq contre un mouton. A la prochaine halte nocturne, il
réussit à obtenir un boeuf, et ainsi de suite jusqu'à ce qu'il arrive à
obtenir un grand château.
Mintenant, à nous la recette, celle
que je réussis à tous les coups et je vous assure que vous y arriverez
bien en suivant mes conseils :
- La
pâte se prépare à l'avance, au moins 4h et idéalement 12h, soit la
veille. Si vous la préparez le jour même, gardez la à température
ambiante pour avoir une bonne levée.
-
Contrairement aux idées reçus et à certaines recettes, ce n'est pas
très gras même si c'est de la friture. Utilisez une bonne huile type
Arachide, changez la régulièrement, chauffez la à bonne température, et
faire égoutter sur du papier absorbant.
-
La pâte doit être collante, légèrement liquide mais consistante pour
avoir une tendre mie, si la pâte est trop épaisse votre mie le sera
aussi. Cependant elle ne doit pas être top lisse.
-
Côté épices et arômates, restons authentiques : ail pilé, poivre noir
moulu, cives ou ciboulette ou persil, et du piment voire beaucoup de
piment car il a tendance à s'estomper durant la cuisson. Les anciens
mettaient du "thym pays", une sorte d'herbe à la feuille velours comme
la sauge mais à la saveur du thym.
- Et enfin, bien déssaler la morue et l'attendrir.
Côté variantes :
- Aux légumes : carottes, giraumon (potiron), malanga ...
- Aux crevettes, à l'oursin, au thon, aux chaubettes (coquillages), aux Titiri (je vous en parlerais dans un autre billet).
- La morue...
Autres
variantes de préparations concernent l'ajout de blancs d'oeufs montés en
neige, ce que je ne fais pas. J'y ajouet un seul oeuf pour donner de la
consistance et du liant, alors que certains n'en mettent pas. Idem pour
le liquide qui sert à diluer, certains y mettent du lait, d'autres de
l'eau ou simplement l'eau de cuisson de l'ingrédient de base comme pour
les chaubettes par exemple.
150 g de morue
250 g de farine
2 verres de lait ou d'eau
1 bouquet de cives dit oignon pays
Quelques feuilles de persil
1/2 sachet de levure chimique ou 1/2 c. à café de bicarbonate de soude
3 gousses d'ail
1 piment antillais
1 oeuf
Sel, poivre
Bain d'huile
Désaler la morue en la plongeant dans de l'eau frémissante, changer l'eau 2 à 3 fois.
Retirer et émietter en "chiquetailleé, c'est à dire très finement et débarassée des arrêtes.
Dans un saladier, mettre les cives et le persil méincé, ajouter l'ail pilé, le piment émincé sans les graines.
Ajouter la farine, la levure, le sel et le poivre, mélanger puis ajouter la morue et l'oeuf.
Verser le lait petit à petit pour avoir une pâte homogène.
Couvrir et laisser lever au moins 4h.
Faire chauffer l'huile sans qu'elle ne soit fumante.
A
l'aide de deux cuillères à café, prélevr la pâte uis enrouler en une
quenelle (à l'aide des deux cuillères), plonger dans l'huile.
L'acras remonte en surface et prend une couleur dorée, retourner délicateent à l'aide d'une fourchette, retirer et égoutter.
Servir en apéro avec des pics ou en entrée avec des crudités.